Contes méphitiques
Anthologie fantastique - Collectif
Editions J'ai Lu
Sorti le 09 mars 2011
Petit format / 286 pages / 7,10€
Présentation de l'éditeur
" Ce jour-là, je quittai la maison de la mort, en proie à un indescriptible sentiment d'horreur. Il me semblait que j'étais à peine éveillé. J'entendais et je voyais les choses comme sous l'emprise d'un cauchemar, " Une épouse est menacée par une revenante, un hypnotiseur ensorcelle une jeune fiancée, une femme-oiseau use de la " fleur du cauchemar " pour endormir son mari et se livrer à des pratiques occultes... Dans ces onze contes noirs, où la magie et l'épouvante règnent en maîtres, démons et fantômes s'infiltrent dans vos maisons, s'agrippent à vos draps, s'immiscent dans vos rêves... et vous empêchent de fermer l'oeil.
Avis d'Asmodée
Contes méphitiques… Derrière la consonance de ce titre à l'horreur grandiloquente, se cache une anthologie hantée par onze nouvelles. Chacune d'entre-elles se voit imprégnée d'une délicieuse aura désuète et morbide, pleine du charme d'antan. Pas moins de sept auteurs vénérables prêtent leurs plumes au service de cet ouvrage faisant une place d'honneur au beau langage et aux superstitions de l'âme humaine. On retrouve ainsi de grands noms de la littérature du XIXe siècle, avec entre autres Joseph Sheridan Le Fanu, Robert Louis Stevenson ou Lord Dunsany.
Résolument ancré dans le fantastique théâtral de par son contexte, bien souvent macabre dans les thèmes abordés, ce recueil se plaît à surprendre ses lecteurs au détour de textes sombres et rares. La Mort, fatalement, fait partie des sujets les plus récurrents au sein de l'anthologie. C'est notamment dans la funeste échappatoire du trépas que l'immoral Lord Glenfallen, dans Un chapitre de l'histoire d'une famille de Tyrone (Le Fanu) trouvera son ultime recours. Cette nouvelle fait partie de mes favorites, tant son atmosphère gothique et son intrigue nous happe tout entier dans la désillusion du mariage de Lady Glenfallen.
Si La Mort rôde dans Contes méphitiques, la crainte de la damnation se réclame également comme un sujet fertile et source d'appréhension dans de nombreux récits figurants au sommaire. C'est en l'occurrence la toile de fond des deux récits écrits par James Hogg. Dans L'expédition de Georges Dobson en enfer, on assiste aux déconvenues d'un conducteur d'attelage qui cherche à tout prix à se soustraire au séjour en enfer auquel il semble promis. Le Familier des tourbières noires, quant à lui, est un conte narrant la déchéance de l'épouse d'un Laird, qui obstinée à se venger d'un de ses serviteurs, va finir par tomber entre les griffes mêmes du Diable. Un récit fantastique qui revendique aussi un certain humour sarcastique.
Autre aspect à souligner dans Contes méphitiques : le rêve ! La dimension des songes se fait porteuse de noirs présages au fil des histoires. Dans Le rêve de l'ivrogne, de Le Fanu, les rêves augurent l'enfer à un charpentier ayant mené une vie de peu de bien. Thème que l'on retrouve dans Sandy le rétameur, de Charlotte Riddell, où c'est une fois encore par le biais des songes qu'un révérend se voit poser un sinistre ultimatum : jeter en pâture une de ses ouailles en enfer, ou se voir condamner pour l'éternité. Et que pourrait-on dire de la nouvelle Aux flux et reflux des marées (Lord Dunsany), où un infortuné dormeur pris dans l'étreinte de Morphée endure la plus troublante des expériences morbides.
Si les ambiances inquiétantes ainsi qu'une inéluctable fatalité sont les points communs des contes de l'ouvrage, leur exhaustivité dans les situations dépeintes et les frissons instillés restent tout autant à saluer. L'extraordinaire dans certaines nouvelles survient parfois au profit du quotidien le plus banal, comme cela est le cas de L'homme au nez, de Rhoda Broughton. Lors du voyage de noce d'un jeune couple, la mariée est en proie à des visions dans lesquelles apparaît un inconnu pourvu d'un nez singulier.
De l’Écosse à l'Italie, en passant par l'Angleterre et ses campagnes austères, l'exploration de nos peurs ne souffre aucune frontière. Avec Les confessions de Pelino Viera, William Henry Hudson nous convie sous le soleil d'un domaine au Portugal pour suivre les déboires d'un jeune argentin manipulé par une vieille sorcière avide de vengeance. L'histoire qui m'a peut-être le moins marqué est celle de Robert Louis Stevenson, La Tordue. Celle-ci, non sans une touche d'humour, narre le traumatisme subit par un révérend lorsqu'une femme âgée se relève d'entre les morts.
Cette anthologie offre une lecture agréable. Chaque œuvre brosse au préalable le portrait de son auteur et du parcours qui fut sien, avec anecdotes à l'appui. Les lecteurs qui affectionnent la littérature de style XIXe se délecteront de la prose raffinée et feutrée typique de cette époque. Les amateurs d'ambiances gothiques, de diableries et de frissons hallucinés ne pourront qu'être ravis : Contes méphitiques est fait pour eux !
L'avis est très bien écrit et détaille très bien ce bouquin, bravo!
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